Nouveau venu dans la famille des électroniques grand public du constructeur britannique ATC, le bloc stéréo P2 reprend l’architecture du bloc stéréo P1 récompensé à plusieurs reprises dans une proposition deux fois plus puissante. Schéma symétrique double mono et large bande passante de rigueur.
Nos lecteurs les plus assidus savent que le préamplificateur ATC SCA-2 a longtemps été notre préamplificateur repère. En plus d’être un fabricant d’enceintes acoustiques, ATC est aussi et depuis longtemps un constructeur d’électroniques puisqu’il en utilise depuis 1984 pour alimenter ses enceintes actives professionnelles reconnues dans le monde entier. Il était donc logique d’un point de vue commercial qu’il décline des gammes d’électroniques professionnelles et grand public.
Un schéma distingué
Pour ceux qui ne le savent pas, le bloc stéréo P1, petit frère du P2, a reçu la récompense suprême « Recommended Component - Class A » par le magazine Stereophile dans la catégorie des amplificateurs stéréo à transistors. Quelle meilleure base de travail pour développer une version plus puissante ?
Comme le P1, le P2 est assemblé à Stroud en Angleterre, dans les locaux d’ATC. Il reprend un châssis similaire à celui du P1 en tôles d’acier pliées et face avant massive et galbée en aluminium brossé atteignant 12,7 mm d’épaisseur. En termes de commandes, c’est très basique avec un récepteur infrarouge pour la communication avec la télécommande et une diode LED bicolore qui indique l’état de mise en veille ou en service.
L’interrupteur de mise sous tension est situé à l’arrière, auprès de deux paires de fiches HP propriétaires et des entrées RCA et XLR. Le libellé « dual mono » indique que l’appareil est construit en conséquence, les racines professionnelles d’ATC se retrouvant quant à elle dans la conception symétrique du schéma. « Notre objectif est d’obtenir la plus large bande passante tout en préservant la phase du signal » indique Ben Lilly, responsable de la R&D chez ATC, « ainsi que la plus faible distorsion, le plus faible bruit et la plus grande fiabilité possible », ajoute-t-il.
Dans ces perspectives, le schéma met en œuvre un étage de sortie propriétaire à triple push-pull de Mos-Fet en configuration source commune associé à un circuit parallèle limiteur à transistors j-fet qui protège l’amplificateur et les enceintes des effets dévastateurs de saturation du signal en cas d’overdrive.
Le constructeur recommande vivement l’utilisation en mode symétrique qui permet un abaissement du bruit de l’alimentation et une réjection accrue des bruits en mode commun.
À l’intérieur, on ne peut pas faire plus double mono puisque l’appareil regroupe deux ensembles comprenant chacun un énorme dissipateur, une carte imprimée avec tous les composants audio et un énorme transformateur torique imprégné de 400 VA. Deux blocs mono sous le même toit, ni plus, ni moins.
Fabrication et écoute
Construction :Le châssis dépouillé du P2 reprend trait pour trait celui de la version P2 Pro à laquelle une paire de poignées de transport et une signalisation plus complète ont été ajoutées. L’implantation interne est également similaire. Aucune fioriture donc, juste l’essentiel, mais un essentiel solide et approuvé par les pros.
Composants :ATC est un fabricant de matériel de studio qui recherche les performances, la linéarité et la fiabilité. C’est donc le pragmatisme qui règne au-delà d’un schéma symétrique propriétaire qui a déjà fait ses preuves sur les modules actifs des enceintes professionnelles.
Grave :Marié pour la circonstance à nos PMC de pedigree professionnel lui aussi, le P2 distille un grave d’une remarquable tenue. Le choix des Mos-Fet en source commune en sortie contribue à donner ce corps au registre doté d’un impact de premier ordre. La ligne de contrebasse sur « Jardin d’hiver » en public par Stacey Kent est distillée avec un détourage de grande précision sur les différents accords. L’effet de présence de l’instrument est assez saisissant, les haut-parleurs restent sous contrôle permanent de l’ATC.
Médium :Le concepteur a porté son dévolu sur le Mos-Fet de puissance pour son caractère sonore percutant mais aussi pour sa douceur qui rappelle celle des tubes. C’est ce que nous démontre le P2 dont la restitution mêle souplesse de texture, douceur du rendu et belle justesse de timbres. La voix de la soprano Simone Kermes interprétant « Ha Vinto Amor » perd cette extra-brillance que beaucoup de blocs à transistors Mos-Fet ont tendance à surligner, tout en conservant un fouillé bien documenté.
Aigu :L’ATC nous gratifie d’une belle abondance de détails sonores agrémentés d’une excellente sensation de matière. On note néanmoins une légère retenue dans l’extension harmonique haute, ce que nous préférons toutefois à l’exubérance très artificielle de nombreux concurrents. Les retombées de note restent néanmoins parfaitement crédibles avec un dégradé subjectif plus court mais toujours cohérent.`
Dynamique :Pour être franc avec vous, quand nous avons ouvert l’appareil et découvert la modeste banque capacitive de filtrage, nous avons eu des doutes quant aux capacités dynamiques de l’ATC. Erreur fatale, car le P2 a crânement déjoué tous nos pièges musicaux, notamment le solo de batterie sur « Company » par Patricia Barber où les frappes tous azimuts écoutées à haut niveau ont retenti de manière physique sans saturation ou distorsion audible. Et les délicates vocalises des Arts florissants sur la piste « Il faut mourir plutôt que de changer » ont rarement été aussi lisibles qu’avec le P2. Respect !
Attaque de note :L’ATC est un amplificateur rapide dans ce sens où il respecte totalement le rythme de la partition en écoute. Par conséquent, les notes se déclinent dans un dégradé harmonique des plus réalistes qui nous fait croire à ce qu’on écoute. La lisibilité est tout à fait excellente avec des contours de notes précis.
Scène sonore :Autre conséquence de cette vélocité, l’espace sonore est très bien proportionné avec une focalisation nette des interprètes. L’étagement en profondeur respecte la prise de son. Par rapport à notre système repère, le volume virtuel de la scène sonore est un peu moins ample, mais c’est la grande harmonie spatiale du P2 qui rend la restitution absolument crédible.
Transparence :L’ATC P2 réussit le pari de proposer une écoute à la fois nerveuse, rigoureuse et raffinée. L’étendue de la bande passante et sa linéarité favorisent un équilibre subjectif très linéaire. Un savant cocktail de dynamite et de soie où la neutralité reste au premier plan.
Rapport qualité/prix :Disposer de 300 W par canal pour moins de 4 000 euros, avec la qualité servie par l’ATC P2 n’est pas donné au premier bloc stéréo venu. Si vous n’êtes pas spécialement exigeant au niveau esthétique, cet amplificateur de puissance pourrait agréablement vous surprendre.
Verdict
Les fabricants d’enceintes acoustiques qui construisent des électroniques ne sont pas légion. L’anglais ATC est de ceux-là et il le fait brillamment. Son dernier-né P2 ne semble être contraint par aucune limitation technique ou sonore dans le cadre d’une écoute qui pourra même dépasser le cadre domestique. À découvrir absolument, sans aucun a priori.
Fiche technique
Origine : Royaume-Uni
Prix : 3 975 euros
Dimensions :448 x 141 x 337 mm
Poids : 30 kg
Puissance nominale : 2 x 300 W sous 8 ohms
Réponse en fréquence : 2 Hz – 400 kHz à -3 dB
Rapport signal sur bruit : > 110 dB
Distorsion : < 0,002 %
Sensibilité : 2 V (150 W, 10 K)
Entrées stéréo : 1 RCA, 1 XLR
Sorties stéréo : 1 RCA « pass through », 2 fiches HP